Cet article s’adresse aux directions générales et artistiques d’une compagnie de création ou de tout organisme culturel ainsi qu’aux individus qui siègent sur des conseils d’administration.
Dans chaque organisation culturelle, les directions sont amenées à planifier le déploiement de leur mission et le développement de leurs activités à court, moyen et long terme. Pour ce faire, elles émettent toutes sorte de plans (plan d’affaires, plan stratégique, plan d’action, plan de communication) et déterminent plusieurs échéanciers. Selon le contexte, quel type de plan est utile? Quelle est la différence entre un plan stratégique et un plan d’action? Comment ces divers plans dialoguent-ils entre eux? Quelles sont les clés de leur mise en exécution concrète? Il existe bien évidemment plusieurs façons de faire qui varient selon les secteurs, les ressources de l’organisation et sa « maturité » organisationnelle.
Ai-je besoin d’un plan d’affaires?
Certains plans sont circonstanciels à une étape de développement; d’autres sont cycliques sur des durées variables. Par exemple, un plan d’affaires s’avère nécessaire lorsqu’une organisation doit convaincre les parties prenantes que son projet « tient la route ». Il sera donc plus pertinent au démarrage d’un organisme ou s’il y a un changement majeur qui vient modifier le modèle financier et d’affaires (par exemple, l’immobilisation d’un lieu de création). Un plan d’affaires va présenter en détail les objectifs projetés du projet, contenir une description détaillée de la structure souhaitée, du mode de fonctionnement et va annexer un plan budgétaire de financement (budget du démarrage et budget des opérations). Pour des structures plus « classiques » dont le modèle a été maintes fois approuvé (par exemple, une compagnie à créateur·trice unique), cet exercice semble moins pertinent. Il peut être un bon allié pour définir une structure beaucoup plus atypique (par exemple, un organisme de service, un modèle mutualisé, etc.).
Complémentarité entre un plan stratégique et un plan d’action.
Pour certains, la différence entre un plan stratégique et un plan d’action n’est pas très évidente. Ce sont les contenus qui varient, ainsi que la nature de l’exercice de réflexion qui va mener à leur rédaction. Un plan stratégique s’inscrit dans une démarche plus générale et large d’introspection organisationnelle. Celui-ci définit les orientations fondamentales pour l’avenir de l’organisation. Il s’agit donc un plan à moyen terme qui porte sur les objectifs et sur les grandes lignes des actions à mener en fonction des choix stratégiques. Il peut contenir une actualisation de la mission, une définition d’une nouvelle vision (le grand rêve!), une définition des valeurs; cela concerne davantage l’identité de la compagnie, son ADN. Les autres éléments importants qui constituent un plan stratégique sont la liste numérotée des enjeux et des orientations, la mise en œuvre de ces derniers à travers des actions. On peut aussi y ajouter le mode de fonctionnement de l’organisation (par exemple, le rôle succinct de la direction, du CA, de l’équipe, etc.) Un plan d’action est beaucoup plus synthétique et se présente souvent sous forme de tableau. Il permet de présenter dans le détail les actions à mener et les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs quantitatifs ou qualitatifs à moyen terme. Il constitue un outil de travail qui assure le processus nécessaire pour la réalisation de la mission, en répondant aux questions essentielles : Quoi? Quand? Par qui? Comment? Selon quels barèmes? Ces deux outils sont donc très complémentaires puisque le plan d’action permet de mettre en œuvre le plan stratégique. Selon les besoins d’une organisation, sa taille et ses enjeux, il arrive d’effectuer un seul plan « hybride » qui contient autant les grandes orientations et stratégies que les actions très concrètes.
Bien souvent, le cheminement qui permet la rédaction d’un plan est tout autant important que le résultat comme tel. C’est l’occasion de mobiliser une équipe de manière transversale, de remettre en question certains principes, de rêver ensemble, de concrétiser des objectifs qui ont du sens et de prendre un certain nombre de décisions.
Quels sont les types de plans plus « opérationnels »?
Un plan d’action et un plan de communication sont des outils opérationnels à usage interne et ne sont pas nécessairement adoptés en conseil d’administration. Rien n’empêche toutefois de les présenter durant un conseil pour mobiliser des administrateurs sur des points spécifiques ou tout simplement informer de la tangente que prend l’organisation. Un plan de communication regroupe les stratégies de marketing, identifie les publics et objectifs pour les communications d’un projet tout en planifiant les actions, le budget et l’échéancier. Il est souvent rédigé par les directions et le·la responsable des communications.
Fréquence et durée d’un plan.
Il n’y a pas de standard concernant la durée d’un plan. Cela dépend des contenus du plan, du type d’organisation ou des événements (par exemple, une nouvelle direction). Un plan peut donc être annuel, bisannuel, quadriennal, quinquennal ou pour une période de 18 mois. Il est intéressant d’arrimer la durée d’un plan sur le cycle des activités artistiques ou sur son cycle de financement pour ceux qui sont soutenus par un bailleur de fonds de manière récurrente. Cela simplifie l’élaboration des prévisions, des bilans d’activités, de l’analyse de l’impact et de l’atteinte de la mission. Au-delà de trois ans, un plan devient rapidement désuet puisque le milieu artistique et culturel évolue très rapidement (transformation numérique, mutations des pratiques du milieu du travail, changement dans les ressources humaines, etc.). Les organisations peuvent donc rapidement ressentir le besoin de renouveler l’exercice réflexif pour repenser son modèle, ses rêves, ses objectifs.
Un plan : un outil pour gouverner.
Comme le dit l’expression latine d’Horace : « les paroles s’envolent, les écrits restent ». Cela constitue l’avantage notable d’utiliser des plans synthétiques qui deviennent des outils de référence pour l’ensemble d’une équipe. Formulés à l’écrit, ils sont facilement transférables à un·e nouveau·velle collaborateur·trice qui n’aurait pas participé aux réflexions initiales, par exemple. À la différence d’un verbatim d’une journée de réflexion, un plan a le bénéfice d’être concis, précis et très concret. Sa lecture est donc rapide et permet de travailler efficacement en équipe dans la réalisation du plan. Bien souvent, le cheminement qui permet la rédaction d’un plan est tout autant important que le résultat comme tel. C’est l’occasion de mobiliser une équipe de manière transversale, de remettre en question certains principes, de rêver ensemble, de concrétiser des objectifs qui ont du sens et de prendre un certain nombre de décisions. Ensuite, quand « tout s’accélère » et que les équipes sont dans le feu de l’action, le plan devient un guide et un moyen de prioriser. Un plan stratégique ou d’action perd tout son sens s’il est mis de côté et qu’il n’est plus consulté. Il peut servir de support chaque saison ou semestre pour faire une rétroaction des derniers mois et préparer ceux à venir. Ce sont aussi de bons outils pour émettre des ponts solides avec le conseil d’administration, la direction et les équipes en place.
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